On commence l'année très fort avec ce RPG récent estampillé Square-Enix. Du tour par tour, tout ce que j'aime. Une longue quête pleine de péripéties. L'histoire commence de manière, il est vrai, classique. Le fameux cliché du jeune garçon qui quitte son village pour entreprendre un voyage en vue de percer ses origines. Prophétie, légende, folklore, culture ne sont que quelques thèmes parmi tant d'autres alimentant le moteur de l'intrigue. Celle-ci démarre lentement, mais bien vite on est enseveli par une avalanche de rebondissements, et ce, même si quelques situations restent prévisibles. Mais majoritairement, plus on avance et plus le jeu surprend par son contenu dantesque. Ce qui est d'ailleurs un très bon point en soi, est que durant la progression on peut se permettre de faire des pauses et de découvrir des quêtes et des mini-jeux, au-delà du farm pour obtenir tous les équipements à forger à l'aide de la Transforge, outil magique utilisable dans les camps pour forger toutes sortes d'équipements sous forme de mini-jeu drôlement addictif. Ce mini-jeu de la forge représente de lui-même "un jeu (bien que petit quand même mais très présent et utile) dans le jeu", car on gagne de l'expérience inhérente à ce mini-jeu à mesure que le Héros (qui est muet et dont le nom dépendra de votre choix) et ses compagnons voyagent et terrassent des monstres, et l'on obtient des compétences nous rendant plus efficace pour forger à condition évidemment d'utiliser ces compétences à bon escient du fait qu'on a un nombre d'utilisations limité en fonction de notre niveau de forgeur. C'est en forgeant qu'on devient forgeron. Ça n'a jamais été aussi vrai dans ce RPG ! Du coup, même si la majeure partie de l'aventure reste linéaire, on aura toujours des objectifs secondaires à accomplir entre les pans de scénario se développant au fil de notre progression. Et le plus beau, c'est que ça ne casse quasiment pas le rythme de l'aventure et de l'histoire. D'ailleurs, les quêtes secondaires ne sont pas trop de type de Fedex, ni trop scénarisées. Un juste équilibre qui fait que ces quêtes secondaires qu'on mène pour les NPC nous apprennent les rudiments du gameplay et du combat, au-delà de la culture et de certaines anecdotes en phase avec le lore du titre.
Au beau milieu de tout ça, il y a des villes et des villages qui regorgent de vie. J'ai rarement vu un monde aussi vivant dans un J-RPG. C'est un gros plus. Ça donne envie de se balader, et moi qui aime flâner je suis servi. Il y a un cycle de jour et de nuit, étant donné que la mappemonde du titre est un open world pour l'occasion de cet épisode 11, vaste de prime abord mais dirigiste au demeurant. Cela dit, il est très agréable à parcourir et on a l'impression qu'il est plus grand qu'il n'y paraît en raison de la structure bien trouvée des cartes et des chemins, surtout au début quand on découvre ce monde ouvert spécial. Il y a une multitude de trésors à grappiller, que ce soit des ressources (fruits, plantes, champignons...) indéfiniment renouvelables sous forme de points lumineux, ou même des coffres. Ces derniers sont principalement enfermés dans des sortes de belvédères scellés par des portes magiques (un peu comme les duplicators dans les Wild Arms). Cela met l'exploration en avant tout en faisant des combats pour devenir plus fort. En veillant à bien s'équiper et à apprendre certaines compétences plus ou moins cheatées dès le départ, le jeu n'est pas spécialement difficile, mais il n'est pas non plus si facile comme certains le disent. Ça reste une difficulté juste accessible mais équilibrée avec un minimum de challenge, avec presque toujours la possibilité de s'en sortir. Et pour les aventuriers les plus chevronnés en quête d'adrénaline, il est possible de choisir certaines conditions sous forme de malus avant de commencer une nouvelle partie. Par exemple, ne pas avoir accès aux boutiques (on doit faire avec ce qu'on trouve en chemin et les pièces d'équipement et potions que nous fournissent les ennemis à leur trépas). Conditions pouvant être annulées définitivement dans une église, à réfléchir à deux fois avant de le faire tout de même. Ça ne participe pas forcément au 100% du jeu ni du platine, mais ça apporte des expériences inédites et du challenge intéressant pour un RPG de cette trempe.
Dragon Quest XI est d'une richesse incroyable. J'ai été bluffé par tout ce qu'il y avait à faire et toutes les subtilités qu'il offre. À chaque événement scénaristique, même si ça avance d'un iota ou s'il se passe juste un petit détail dans la quête pour nous permettre d'avancer, les dialogues des PNJ (ou de presque tous les PNJ) d'une ville changent. Cela participe activement à l'ambiance particulièrement vivante du jeu. Les textes sont très bien écrits, avec un français soutenu de très bonne facture qui parsème par moment la langue de Molière. D'ailleurs, en parlant de langue, le jeu a le bon goût de doter ses habitants d'un accent provenant d'un pays connu de notre monde à nous, dans la réalité, dans leurs dialogues. Ainsi, ne vous étonnez pas que dans une ville inspirée de Venise les PNJ ajoutent quelques mots en italien avec le français, même si le nom de la ville est inventé de toute pièce. Ça apporte vraiment un charme particulier au jeu, ce genre de petit détail. On a vraiment la sensation de faire le tour du monde et de voyager aux quatre coins du globe, ce faisant. Et même si l'atlas ne semble pas si grand que ça en affichant la carte du monde, croyez-moi, c'est plus grand qu'il n'y paraît et de toute façon le rythme progressif du scénario nous amène à redécouvrir le monde, de manière intelligente et sans donner la sensation de le refaire qui plus est. En effet, l'histoire est à la hauteur du contenu du jeu : d'une richesse époustouflante. Et on met du temps à construire notre équipe en parcourant Elréa, ainsi se nommant l'univers attachant de ce Dragon Quest. Le titre marque clairement un retour de la fameuse licence japonaise sur PS4 avec un gros épisode, et prouve qu'en 2018 il est encore possible de faire des J-RPG au tour par tour transpirant un certain classicisme certes, mais au contenu gargantuesque. Le système de combat, où ici on voit les persos combattants (jusqu'à 4 participants en combat pouvant être remplacés à tout moment par les membres de réserve de l'équipe sauf en cas de malus d'altération d'état entravante à guérir), est également d'une grande richesse. La grande nouveauté vient surtout de l'état Hypertonique que peut atteindre n'importe lequel de vos persos simplement en passant plusieurs tours dans les combats, et survenant donc aléatoirement principalement. Mais plus tard, il sera possible d'accélérer et de "personnaliser" ce mode de concentration à l'aide d'accessoires ou d'effets permanents accélérant la venue de l'état Hypertonique. Cet état semblable à la Transe de FFIX, ne disparaît pas forcément après un combat. On peut combattre en étant sous cette transe nimbant le corps de notre personnage ou des personnages concernés d'une aura bleutée en utilisant les commandes conventionnelles du menu de combat. Ceci dit, si vous utilisez les commandes de l'état d''hypertonicité, le personnage utilise son pouvoir hypertonique dans le combat en exécutant une attaque spéciale qui le fera revenir dans son état normal. Mais bien souvent, cet état dépend soit de la présence d'un autre personnage qui peut aider le perso hypertonique à exécuter son attaque en fonction des compétences de combat apprises dans leur arbre de compétences, ou alors de deux ou trois membres de l'équipe devant être en état hypertonique afin d'exécuter des attaques combinées (appelées combos d'équipe) qui infligeront des dégâts importants, octroieront des effets positifs ou soigneront l'équipe entre autres. De plus, cette sorte de limite augmente drastiquement les statistiques de nos combattants, les rendant ainsi plus puissants et plus résistants. Une idée merveilleuse qui a su faire ses preuves à maintes reprises au cours de mon aventure. Et les combinaisons de combos d'équipe sous effet hypertonique sont nombreuses. Les arbres de compétences sont structurés sous forme de ruches d'abeilles en essaims pour y prélever le miel donnant toute la saveur à nos guerriers pour leur permettre de battre des ailes et de se surpasser. Nous avons donc des cases hexagonales qui sont déverrouillées et accessibles (à condition d'avoir le montant requis pour acheter la comp') de manière adjacente. Celles qui renferment les capacités (actives ou passives) les plus efficaces ou des augmentations de caractéristiques importantes doivent être débloquées en brisant trois, quatre ou cinq cases autour. Ce qui veut dire qu'il faut réfléchir un minimum au parcours de son personnage au sein de l'arbre pour lui faire acquérir les meilleures compétences possibles en fonction de sa classe mais aussi de vos préférences personnelles selon de l'orientation choisie au départ. Certains personnages peuvent utiliser les mêmes armes (dagues, épées courtes, baguettes, cannes...) ou pièces d'armures, mais il en résultera plus de personnalisations qu'il n'y paraît malgré leurs capacités innées communes de certains ports d'équipement identique. Certains utiliseront des armes uniques propres à leur classe (exemple : on a un voleur qui peut utiliser des boomrangs dont lui seul peut se servir, la particularité de cette arme étant de toucher plusieurs ennemis et groupes d'ennemis d'un lancer, mais il faudra améliorer la précision et l'attaque pour révéler le potentiel de la technique en s'orientant sur ces stats le plus tôt possible).
Outre sa richesse incommensurable, le jeu contient une quantité colossale de clins d'oeil et de références à la série Dragon Ball, que cela se retrouve tant dans le scénario, des événements, les décors, les personnages ou sur les monstres... Pour le plus grand bonheur des fans d'Akira Toriyama, comme moi. C'est un cadeau pour eux. Et ça s'intègre harmonieusement à l'univers de ce DQ. La bande son joue un rôle majeur dans l'immersion. On reconnait tout de suite le style propre à la série au travers des mélopées aux sonorités médiévales et symphoniques, avec une touche épique dans les combats rappelant vaguement FF9 durant quelques secondes. Au début, alors qu'on traverse pas mal de villes dans les premières heures de l'aventure, on se rend compte que les thèmes musicaux de village ont tendance à se retrouver souvent d'un patelin à l'autre, tout comme les thèmes royaux qu'on entend dans les châteaux. Ils ne varient pas beaucoup mais ont le mérite d'offrir une variante le jour et une autre la nuit. Le jour, c'est plus enjoué et animé, et les gens sont plus enclins à se promener dans les rues bien achalandées et débordantes de vie sous un soleil de plomb. Tandis que la nuit, c'est plus paisible, la musique inspirant un sentiment de quiétude et de réconfort sous une toile céleste et il y a pas mal de gens qui dorment. Les PNJ changent de position et de routine en fonction des moments de la journée, tout comme leurs dialogues qui peuvent varier pour certains. C'est un détail, mais un détail qui prouve encore une fois que le jeu déborde de vie et que les développeurs ont réalisé un travail sérieux. La musique est planante, vivante, très présente et rarement discrète. Elle fait indubitablement partie du jeu et lui confère une identité propre. En combat, elle se révèle épique et même un tantinet amusante, ce qui va de pair avec le look parfois drôle des monstres. On regrettera cependant qu'elle manque de variété au final, la faute à plusieurs musiques se ressemblant vaguement et du peu de morceaux que comporte cet OST. Mais il n'en reste pas moins que la bande sonore est très belle dans l'ensemble, dégageant un grand sentiment d'aventure. On se surprendra même à siffloter certaines pistes. Sinon, j'ai trouvé un peu dommage l'ergonomie des menus, notamment à l'heure de répartir les objets dans les inventaires/menus de combat de nos persos à partir du menu général, où l'on retrouve une certaine lenteur et lourdeur pour assigner les objets de soin et autres en déterminant leur nombre. Mais rien de bien méchant non plus.
Au final, on se retrouve avec un RPG très complet, à l'histoire s'étoffant progressivement pour nous noyer de rebondissements. Nanti d'un système de combat classique par défaut mais recelant un énorme potentiel de possibilités et truffé de subtilités le rendant fort addictif, d'autant plus qu'on peut programmer les persos en mode auto et leur assigner des stratégies un peu à l'image des gambits de FFXII mais beaucoup plus simplifié et basique (bien pratique pour leveler rapidement). Le jeu est assez beau graphiquement, du moins pour son style et pour l'ambiance qu'il dégage. Pour un Dragon Quest, on a un joli cel shading avec des traits de Toriyama faisant tout le sel de l'univers de ce onzième opus. Ça remplit le cahier des charges pour un Dragon Quest offrant un monde coloré, basculant entre lumière et ténèbres parfois, mais jamais sans sombrer dans des couleurs ternes. Ce n'est pas toujours finement détaillé, mais les textures restent agréables à l'oeil nu grâce à des lissages propres et des nuances colorées douces. C'est vraiment un jeu enchanteur et étonnamment long. Ça, c'est un autre de ses atouts. La durée de vie monstrueuse. Je pense que pour un joueur allant à peu près vite ou ayant beaucoup l'habitude de J-RPG, ça se joue grosso modo 50-60h en ligne droite en s'attardant un peu sur des quêtes secondaires ou du farm. Plus de 100 heures ou même plus de 150 heures pour tout faire. 200 heures même en prenant son temps et en étudiant les possibilités du jeu tout en faisant le post-game. Compléter le bestiaire et le compendium peut s'avérer particulièrement chronophage. Je n'ai pas du tout été déçu. Je m'attendais juste à un bon jeu à la base, mais pas à un petit chef-d'oeuvre, ce qu'est ce jeu. J'ai également beaucoup ri et ai été marqué par l'humour génial qui découle de presque toutes les situations, et ce même si le jeu sait aussi se révéler touchant, mélancolique et poignant le moment venu. J'ai été soufflé par la réalisation d'orfèvre de cette pépite d'or du RPG moderne reprenant des mécaniques anciennes et efficaces. À côté, FFXV m'a paru bien fade et autre chose qu'un RPG : un Devil May Cry-like. Et Dieu sait pourtant que j'ai bien apprécié FFXV. Mais la comparaison avec DQXI ne tient pas la route. Dragon Quest 11 lui met une belle râclée. C'est donc sans surprise que j'ai ADORÉ ce 11ème volet de cette célèbre saga du pays au soleil levant. J'espère que la venue de ce jeu permettra de réaliser d'autres volets Dragon Quest de la même qualité grandiose, à l'avenir. Il est, sans conteste, l'un des meilleurs J-RPG que j'ai pu faire ces dernières années.