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Égalitarisme Et Révolution Sociale

Zak Blayde

T_T Des fois j'ai l'impression que tu lis pas ce que j'écris. D'après moi ils n'ont pas raison de le faire puisque je ne crois pas en la répression étatique. Et d'après moi ils sont cons parce qu'ils doivent avoir de la merde dans les yeux pour croire encore que grâce à Sarko y'aura plus de cassos qui agressent d'autres personnes.

C'est pas la vérité universelle mais ne dis pas que je leur donne raison.

Medion

tt.gif Des fois j'ai l'impression que tu lis pas ce que j'écris. D'après moi ils n'ont pas raison de le faire puisque je ne crois pas en la répression étatique.

Donc ils devraient faire quoi pour se venger ? Leur casser la gueule ? C'est mieux ?

Enfin bref, laisse tomber...

Zak Blayde

Je sais pas ce qu'ils devraient faire, mais ils devraient arrêter de voter Sarko pour ces raisons là parce que ça sert à rien, et plutôt regarder les programmes économiques.

Medion

Ben ça sert à rien de casser la gueule aux racistes japonais, mais ça défoule comme vengeance, pareil ^_^

Zak Blayde

Tu retournes au sujet précédent là ? Moi ça serait pas histoire de me défouler puisque je risquerais de me faire défoncer, mais ça serait juste pour leur faire comprendre qu'ils sont pas les bienvenus. Enfin je suis pas japonais donc en l'occurrence ça serait moi le malvenu héhé.

Shinji

Juste pour revenir sur le fait de tuer des salauds.

Le problème est le point de vue, si on se met d'un point de vue individuel alors oui la notion de meutre peut être légitime car on se rend "service".

Mais au niveau de la société, on ne peut cautionner le meurtre de quelqu'un d'autre car celà va à l'encontre de tout modèle de société.

Si on autorise le meurtre, on permet à n'importe qui d'avoir des raisons de tuer et on établit plus aucune entité neutre de régulation.

Car la société sert à conditionner les comportements de chacun dans une norme vivable pour la majorité.

Elle est là pour conditionner justement ces comportements primaires et individualistes qu'on peut avoir envers autrui.

Après les japonais sont xénophobes et cela on le sait tous. Donc quelque part cela me choque meme pas l'histoire du début. Il est toujours normal d'avoir peur de ce qu'on connait pas et en général la réaction primaire est le rejet.

Quelque part le racisme pour 80% je dirais c'est hélàs juste de la méconnaissance de l'autre et donc un refus de comprendre ses habitudes/cultures/traditions.

Alors peut etre que ça va changer un jour au Japon mais bon il faut du temps...

MARC

C'est à cause de posts de ce genre la l'expression "zak blayder", il me semble...

"Zak blayder": verbe du premier groupe, relatif à Zak Blayde, célébre critique Underground. 1. Révolutionner, Tourner en rond dans le sens inverse du pot, dans le but de rester éveillé (Voir Midnight Express), avec un sens armé du jugement, allant jusqu'à tenter d'inverser la rotation terrestre autour du Soleil...ce qui, d'aprés certains, reviendrait au même. 2. fam. zak blayder un film, visionner une oeuvre "cinématogorphique" qui sort des sentiers battus, pour entrer dans un décor inconnu, de préférence sous la nuit noire, aux alentours de minuit... 3. Improviser sa vie, à la belle étoile, à la bonne franquette, sans contrainte superflue, le monde comme foyer dans la préservation des espaces naturels... 4. Zaak blaydeer! Cri sépulcral (sur tréfond musical approprié) signifiant: "Propriétaire de personne, propriété pour tous!"

Medion

:lol:

Très bon

Ahltar

Enorme même, à mettre dans le topic des perles je pense...

Sinon, bravo à Shinji qui explique d'une façon qui me satisfait tout à fait pourquoi il ne faut pas tuer.

C'est une magnifique utopie en fait car des gens en tuent d'autre quand même.

De même ton raisonnement est extensible à la violence en général, pourtant ici encore, des gens sont violents parfois complètement gratuitement.

Alors que faire ?

Tenter de réinsérer ces marginaux ? Par la force si nécessaire (les foyers pour jeunes semblent bien s'en tirer) ? Les exclure (prison) ? Les exclure plus radicalement (réinstaurer la peine de mort) ?

Mais au frais de qui ? Qui voudrais payer, dans un monde capitaliste, pour aider des gens qui leur ont fait du mal et qui ont un très fort risque de ne rien rapporter par la suite ?

En fait, j'ai beau y réfléchir, je trouve vraiment que le système actuel propose pas mal de recours plus ou moins intéressants avec des résultats généralement quantifiable voir encourageants. Je me souviens d'un reportage sur des espèce de maisons de réinsertion qui fonctionnait à un peu plus de 50% de réussite. C'est très couteux mais si ça permet à tous de vivre mieux, j'approuve.

Maintenant, on affronte d'autres problèmes, le système judiciaire est trop engorgé et la police se prend en ce moment une politique de quantité en dépit de la qualité. Ajouté à cela les réformes diminuant le nombre de magistrat en France, cela me laisse perplexe en fait.

On trouve plein de solutions plus ou moins efficaces à leur niveau mais on ne se donne pas les moyens pour les appliquer pleinement...

Mais où allons-nous ?

PS : ceci est un espèce de mini coup-de-gueule ne visant personne en particulier...

Zak Blayde

"Zak blayder": verbe du premier groupe, relatif à Zak Blayde, célébre critique Underground. 1. Révolutionner, Tourner en rond dans le sens inverse du pot, dans le but de rester éveillé (Voir Midnight Express), avec un sens armé du jugement, allant jusqu'à tenter d'inverser la rotation terrestre autour du Soleil...ce qui, d'aprés certains, reviendrait au même. 2. fam. zak blayder un film, visionner une oeuvre "cinématogorphique" qui sort des sentiers battus, pour entrer dans un décor inconnu, de préférence sous la nuit noire, aux alentours de minuit... 3. Improviser sa vie, à la belle étoile, à la bonne franquette, sans contrainte superflue, le monde comme foyer dans la préservation des espaces naturels... 4. Zaak blaydeer! Cri sépulcral (sur tréfond musical approprié) signifiant: "Propriétaire de personne, propriété pour tous!"

:lol:

J'espère que vous aurez d'ailleurs tous remarqué ma nouvelle signature.

Medion

Oui, et c'est assez insultant !

Spike Spiegel

Les Japonais sont-ils vraiment racistes? J'ai plutôt l'impression qu'en général ils veulent défendre à tout prix leur niveau de vie et leurs emplois. Après c'est sûr qu'il y a des racistes partout (donc même au Japon).

MARC

J'espère que vous aurez d'ailleurs tous remarqué ma nouvelle signature.

C'est ce que font tous les tortionnaires, même(!) quand on n'est pas d'accord avec eux... ou pas consentant!

Zak Blayde

Les Japonais sont-ils vraiment racistes? J'ai plutôt l'impression qu'en général ils veulent défendre à tout prix leur niveau de vie et leurs emplois. Après c'est sûr qu'il y a des racistes partout (donc même au Japon).

Il s'agit surtout de xénophobie je pense, un peu différent du racisme. Bon après faudrait vivre au Japon pour pouvoir en parler.

Spike Spiegel

Je pense aussi qu'il faudrait y vivre pour pouvoir en parler. De l'extérieur je les trouve plus nationalistes que racistes ou xénophobes (pour la majorité).

Hayward

Les Japonais sont-ils vraiment racistes? J'ai plutôt l'impression qu'en général ils veulent défendre à tout prix leur niveau de vie et leurs emplois. Après c'est sûr qu'il y a des racistes partout (donc même au Japon).

Je dirai qu'sil on peur de ce qu'ils ne connaissent pas. Et comme ils ont vecu plus de deux siecles coupes du monde, cette peur doit presque etre ancree dans leurs traditions. De toute facon, c'est la meme chose dans tous les pays du monde a des echelles plus ou moins grandes. En France, on a utilise immigration pendant longtemps donc je pense qu'on est plus tolerants envers les etrangers, ca ne veut pas dire qu'on n'en a pas peur.

Je trouve ca normal, d'avoir en premier lieu un sentiment de mefiance a l'egard des etrangers. Apres cette mefiance se dissipe une fois qu'on discute avec cette personne (je parle etrangers au sens large, tous les passants dans la rue sont des etrangers vu qu'on ne les connait pas).

Zak Blayde

Une vidéo qui tourne sur Youtube, montrant les conditions d'abattage des bovins dans les abattoirs Charal.

En gros, les animaux sont encore vivants et conscients lorsqu'ils agonisent, alors qu'ils devraient être inconscients. On peut très légitimement supposer qu'il en est de même dans les autres abattoirs industriels.

Zak Blayde

EDLA

En revanche, et comme souvent, les libertaires sont parmi les humanistes de ces histoires sordides, alors que notre non allergie à la violence (ce n'est pas général non plus) est toujours condamnée.

C'était pour décrire un semi-paradoxe du libertarisme individualiste. Le meurtre est envisageable donc on passe pour des monstres mais en même temps on est les premiers à défendre les opprimés des causes sociales. Y'a pas vraiment de rapport si ce n'est la façon dont les anarchistes sont perçus par "les autres".

Pour revenir sur le thème de la violence, et notamment ses manifestations dans l'histoire humaine : si la dialectique des fins et des moyens efface le problème de la violence, par sa rationalisation à outrance (la bonne vielle entourloupe, de la caricature de la "ruse de la raison), l'inverse est elle-même une impasse. En ramenant la question de la violence à une inexplicable ontologie (et dont Paul Ricoeur nous en fournit la plus belle formule : "Le mal, c'est ce qui est et ne devrait pas être, mais dont nous ne pouvons pas dire pourquoi cela est"), on s'interdit non seulement de la penser mais, mais on en vient également à cette idée illusoire que le triomphe du moralisme abstrait, finirait par résoudre cet insoluble contraiction. Le cas de Karl Popper, est à cet égard particulièrement représentatif. Le penseur autrichien met en accusation dans son livre "la leçon de ce siècle" la stupide querelle des intellectuels, sur la question d'un monde meilleur, futilité qui déboucha sur les grandes tragédies du XXème siècle : "depuis des millénaires, nous, les intellectuels, nous avons causé les maux les plus terribles. L’extermination d’une masse au nom d’une idée, d’une doctrine, d’une théorie, c’est là notre œuvre, notre invention : une invention d’intellectuels. Si nous cessions de dresser les hommes les uns contre les autres (certes souvent avec les meilleures intentions), même si nous nous en tenions là, ce serait beaucoup".

La cible de la polémique est sans détour, toute volonté de concrétiser un idéal, aboutira inévitablement en son contraire : "tous ceux qui se sont proposés de créer le paradis sur terre n’ont engendré que l’enfer". Cette position recoupe le concept développé par Carl Schmitt, de "la guerre civile", dans son ouvrage "Le Nomos de la Terre", comme triomphe du politique, en tant que lieu d’un affrontement existentiel entre l’ami et l’ennemi. Pour le juriste nationaliste allemand, la stratégie de guerre civile a pour effet de conduire à l’absolutisation de l’ennemi, à la négation de tous les droits du vaincu, et plus encore, à la dissolution du jus publicum europaeum, cet ordre juridique l'Europe Chrétienn, né avec la Réforme et mort dans les spasmes des guerres totales de notre époque. Ernst Nolte s'inscrit sur des bases similaires, mais se différencie toutefois du politologue allemand, en ne datant pas cette guerre en 1914, avec l’effondrement de l’ancien ordre européen, l’éclatement d’une guerre mondiale, l’ouverture d’un cycle de révolutions et de contre-révolutions et la brutalisation de la vie politique qui seront à l’origine des totalitarismes modernes. Pour l'historien allemand, la "guerre civile européenne" (titre fameux de son livre ou figurent ses thèses) date de 1917, avec la révolution russe qui fut suivie, deux ans plus tard, grâce à la fondation du Komintern, par la naissance d’un "parti de la guerre civile mondiale".

Comme Carl Schmitt, Nolte soutient que le mal radical du XXème siècle trouve sa source agissante dans Robespierre et Saint-Just (icarnation même de la terreur jacobine, engendrée par l’abstraction et le fanatisme des philosophes des Lumières), mais avec cette particularité que la Révolution d’Octobre, n’en est rien d’autre que son plus proche héritier. Le traité de Versailles et les procès de Nuremberg sont pour lui autant de "comités de salut public" : ils prennent leur sens dans la foulée d’une stratégie de guerre civile internationale qui, de Robespierre à Lénine, a fini par abolir la distinction entre civils et militaires garantie par l’ancien art de la guerre. Nolte enfonce le clou en rendant le communisme russe, comme responsable du surgissement du nazisme. Premier exemple d’un régime totalitaire pratiquant, dès le début de la guerre civile russe, une politique de terreur et d’"extermination de classe", le bolchevisme aurait agi sur l’imaginaire allemand à la fois comme "repoussoir" et comme "modèle". Les pratiques criminelles et génocidaires du national-socialisme seraient donc explicables comme réaction « exacerbée » à une menace d’anéantissement incarnée par le bolchevisme russe. L’antisémitisme nazi n’est, à ses yeux, qu’"une espèce particulière d’antibolchevisme" et le génocide juif rien d’autre que " l’image inversée de l’extermination, elle aussi tendancielle, d’une classe mondiale par les bolcheviks."

Je n'ai pas l'intention de discuter pour le moment de ces thèses, qui ignorent superbement le poids du nationalisme romantique de la culture conservatrice allemande du XIXème siècle, et les ravages de l'impérialisme colonialiste, recoupant les délires racistes du darwinisme social. Mais à ce fond commun d'idée entre Popper, Nolte voire Furet, on devine bien que les philosophies de l'histoire, issu de l'idéalisme allemand, Hegel bien sûr mais également dans une certaine mesure, celle de Marx, fassent les frais d'une telle condamnation. Pour en revenir plus spécifiquement à Popper, il en suffirait pourtant de peu pour réaliser la paix et la cohabitation paisible. Il faudrait simplement suivre les normes morales, dont l'accessibilité est à la portée de tous. Ainsi :"Le plus important des dix commandements dit : tu ne tueras point ! Il résume presque toute l’éthique. Ainsi, la façon dont Schopenhauer formule son éthique n’est qu’une extension de ce commandement capital. L’éthique de Schopenhauer est simple, directe, et claire. Il dit : ne fais de tort à personne, ne blesse personne; au contraire aide tout le monde du mieux que tu peux".

Mais lorsque il se trouve face à un conflit réel, voilà que Popper non seulement légitime la guerre du Golfe, mais souhaite qu’elle puisse marquer le début de toute une série d’opérations analogues, destinées à réaliser la "paix mondiale" et perpétuelle : "Nous ne devons pas avoir peur de conduire des guerres pour la paix. Dans les actuelles circonstances, cela est inévitable. C’est triste, mais nous devons le faire si nous voulons sauver le monde. La détermination est ici d’une importance décisive". Le moins qu’on puisse dire, c’est que la clarté et l’univocité du commandement qui impose de "ne pas tuer", et même de "ne pas causer de tort à personne" s’est complètement dissoute. Il y a même davantage : le "salut" de l’humanité est un objectif qui justifie pleinement le recours à la violence et à la guerre. L’attitude traditionnellement attribuée à la philosophie de l’histoire marxiste et communiste, condamnée parce qu’intrinsèquement totalitaire, une telle attitude de "faux prophète", est maintenant assumée de façon explicite par Popper. Il poursuit ainsi : les "ennemis mortels" qu’il faut liquider ou mettre en condition de pas pouvoir nuire sont nombreux ; il ne s’agit pas seulement des "États terroristes", il y a aussi "la Chine communiste, qui est pour nous impénétrable". La croisade pour la paix et la démocratie s’annonce donc d’emblée comme une série ininterrompue de guerres qui, étant donné leur caractère idéologique, ont tendance à se configurer comme des guerres totales. Nous sommes de nouveau conduits, ironie de l'histoire à l’analyse de Schmitt et de son école de pensée, selon laquelle la plus catastrophique des ingénieries sociales est précisément celle de la paix perpétuelle, s’agissant de l’utopie qui se transforme en contre-utopie le plus facilement et de la façon la plus désastreuse.

A la vérité, le moralisme de Popper, comme antidote aux malheurs tragiques du XIXème siècle, fut déjà réfuté justement par Hegel (l'une des grandes bêtes noires du penseur autrichien). Il est de bon ton de considérer que l’histoire pourrait donner des leçons : on doit apprendre l’histoire pour ne jamais recommencer les mêmes erreurs, dit-on. Le traumatisme que l’extermination des Juifs d’Europe a provoqué renforce cette idée : ne pas oublier pour qu’il n’y ait "plus jamais ça !"

Dans sa "Raison dans l'Histoire", Hegel détruit cette illusion. Certes, les bons exemples peuvent élever l’âme et, en ce sens, l’étude de l’histoire à cette fin peut être utile pour les enfants. Pourtant, "les destinées des peuples et des États, leurs intérêts, leurs conditions et leurs complications constituent cependant un tout autre domaine que celui de la morale. (Les méthodes morales sont des plus simples ; pour un tel enseignement, l’histoire biblique est largement suffisante. Mais les abstractions moralisantes des historiens ne servent à rien". Et Hegel d'ajouter brutalement :"l’expérience et l’histoire nous enseignent que peuples et gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, qu’ils n’ont jamais agi suivant les maximes qu’on aurait pu en tirer". Et la raison en tient à la matière même de l’histoire :"Chaque époque, chaque peuple, se trouve dans des conditions si particulières, forme une situation si particulière. que c’est seulement en fonction de cette situation unique qu’il doit se décider ; les grands caractères sont précisément ceux qui, chaque fois, ont trouvé la solution appropriée. Dans le tumulte des événements du monde, une maxime générale est d’aussi peu de secours que le souvenir des situations analogues qui ont pu se produire dans le passé, car un pâle souvenir est sans force dans la tempête qui souffle sur le présent; Il n’a aucun pouvoir sur le monde libre et vivant de l’actualité. (L’élément qui façonne l’histoire est d’une tout autre nature que les réflexions tirées de l’histoire. Nul cas ne ressemble exactement à un autre. Leur ressemblance fortuite n’autorise pas à croire que ce qui a été bien dans un cas pourrait l’être également dans un autre. Chaque peuple a sa propre situation, et pour savoir ce qui, à chaque fois, est juste, nul besoin de commencer par s’adresser à l’histoire.)"

Chaque situation est singulière et l’application de maximes générales est inutile, tout comme l’est le souvenir d’un évènement analogue dans le passé. Si en effet l’histoire ne se répète pas, il est impossible d’en tirer des maximes générales ou des "lois". Ainsi, ce retour au moralisme moralisant, comme contrepoids à ces soi-disantes légitimations du mal, qu'incarnent les philosophies hégéliennes et marxistes de l'histoire, est non seulement aussi vain que l'amoralisme troskyste (que ce dernier contredit pourtant de sa main) de la dialectique des fins et des moyens, mais présente cette même tendance à verser dans un fanatisme meutrier et sans fin,...

EDLA

Pour poursuivre dans cette thématique, on pourra évoquer les Réflexions sur la violence de George Sorel et de son disciple et fidèle ami Edouard Berth, à travers le prisme de la lutte des classes. D'inspiration marxiste mais également proudhonienne, Sorel et Berth se réclameront d'un socialisme libertaire, par la voie du syndicalisme révolutionnaire par opposition aux formes de socialisme autoritaire, que l'on peut trouver en filigrane chez le viel Engels, mais sutout chez Lassalle, Kautsky, Plekhanov (Jules Guesde et Paul Lafargue en France) et qui serviront d'ossature à l'édification au siècle suivant du marxisme orthodoxe. Pour bien afficher sa différence avec la doctrine officielle, Sorel va jusqu’à écrire dans son livre sur La décomposition du marxisme, que Marx a toujours décrit la révolution sous la forme d’un mythe. Thématique qui traversera toute la pensée sorélienne. Comme l'en témoigne son introduction de ses Réflexions sur la violence: "Au cours de mes études, j’avais constaté une chose qui me semblait si simple que je n’avais pas cru devoir beaucoup insister, les hommes qui participent aux grands mouvements sociaux se représentent leur action prochaine sous forme d’images de bataille assurant le succès de leur cause".

Ces images de bataille, sont précisément ce que Sorel appelle des mythes: "Un mythe est au fond identique aux convictions d’un groupe et par suite il est indécomposable en parties qui puissent être appliquée sur un plan de descriptions historiques". Sorel précise encore, dans sa lettre à Daniel Halévy figurant en tête des Réflexions sur la violence, que le mythe s’oppose directement, non pas à la raison, mais bien à l’utopie. Tandis que l’utopie est le produit d’un travail intellectuel, le mythe est avant tout une expression de volonté. Alors que l’utopie n’est qu’une abstraction, le mythe est une façon de mobiliser les énergies autour d’objectifs parfaitement concrets. C'est ainsi que Berth dans Les méfaits des intellectuels, interprète le mythe comme "une expression de volontés, et non, comme l’utopie, la traduction intellectualiste de rêveries sociales".

Pour Sorel, le mythe mobilisateur, socialement agissant, est précisément celui de la grève générale. Le thème de la grève générale a souvent été opposé aux consignes des grandes centrales syndicales, comme reflétant la volonté spontanée des masses ouvrières aspirant à l’action directe et à la rupture totale avec l’Etat. Sorel souligne à son tour que "la grève générale n’est point née de réflexions profondes sur la philosophie", mais qu’elle "est issue de la pratique". Il ajoute que "chaque grève, si locale qu’elle soit, est une escarmouche dans la grande bataille qu’on nomme la grève générale". La grève générale, finalement, est "le mythe dans lequel le socialisme s’enferme tout entier, c’est-à-dire une organisation d’images capables d’invoquer instinctivement tous les sentiments qui correspondent aux diverses manifestations de la guerre engagée par le socialisme contre la société moderne". L’image, chez Sorel, s’oppose au concept. Elle ne fait pas appel à l’intellect, mais aux sentiments. Le mythe s’apparente à l’image: non seulement il est, en quelque sorte, une image en mouvement, mais il contredit la raison purement intellectuelle à la façon dont l’image s’oppose au concept.

Comme le dira Berth, si Sorel définit la grève générale comme un mythe, ce n’est donc pas "du tout pour l’affecter d’un caractère illusoire, mais pour en affirmer, au contraire, l’aspect pratique et réaliste. Les mythes, en effet(…)gouvernent l’action, qui n’est jamais guidée par la seule science, ils sont l’expression d’une sorte de poésie sociale(…)L’homme ne ferait jamais rien s’il n’était que raison". Dans le même esprit, Jacques Julliard dans son livre Autonomie ouvrière. Etudes sur le syndicalisme d’action directe, a noté que chez Sorel "la prise en compte des éléments irrationnels au sein du corps social n’est nullement synonyme d’irrationalisme, quand ils procèdent au contraire d’un effort systématique pour analyser et comprendre la fonction de cet irrationnel". "La fonction essentielle du mythe est de donner à la vie un coefficient d’héroïsme", a pu dire l’économiste François Perroux, qui fut dans sa jeunesse un grand admirateur des idées soréliennes.

Ce passage appelle un commentaire. Pour Marx, le communisme n’est pas une idée toute faite, un projet utopique, c’est tout simplement le mouvement réel qui abolit l’ordre existant. Ce qui renvoie directement à la 11ème et dernière thèse sur Feuerbach: "Les philosophes ont seulement interprété le monde de différentes manières, il s’agit de la transformer", véritable passage fondateur de la philosophie de la praxis. Notons que Engels intriquera par la suite le terme "aber" inexistant dans le texte original, pour quoi la phrase sonne ainsi : "les philosophes ont jusqu’à présent interprété le monde de différentes manières. Il s’agit au contraire de la transformer". la bonne foi d'Engels dans ce rajout ne fait guère de doute. Mais aléa de l'histoire, la mouvance la plus dogmatique du marxisme orthodoxe en viendra à cette conclusion érronée de l'opposition entre l’interprétation et la transformation. Comme si l'on pouvait transformer quelque chose sans l’avoir préalablement interprété correctement. Car pour Marx, il s'agit bien d'abolir la philosophie, mais en la réalisant, et par là même de la dépasser. Réglant ses comptes dés 1845 avec son "ancienne conscience philosophique" dans L’Idéologie Allemande, Marx se place certes désormais sur un terrain d’où la métaphysique a été exclue, sur le terrain du matérialisme historique et de la critique de l’économie politique. Mais Marx ne cessera jamais de s'opposer à ceux qui traite son vieux maître en chien crevé. Et la problématique hégélienne marquera de son empreinte les ouvres ultérieurs de Marx, et le terrain de la philosophie de l'histoire n'y fait pas exception (et ce malgré les critiques de Marx sur ce thème à l'égard de Hegel).

Ainsi, cette volonté d'établir une scissure entre les travaux de Marx, et son imprégnation passée de la philosophie antique, l'humanisme civique de la Renaissance, celle des Lumières et par la même de l'idéalisme allemand, cette notion althusérienne de la "rupture épistémologique", n'a aucun sens. Ainsi, "l'impératif catégorique (nb : un principe typiquement kantien) de bouleverser tous les rapports où l'homme est un être dégradé, asservi, abandonné, méprisable" formulé à la conclusion de la critique marxiste de la religion, transparaît à travers toute la condamnation dans le Capital, du mode de production capitaliste, ou domine l'extorsion de la plus-value, privant le prolétariat des fruits de son travail, au bénéfice des classes dominantes bourgeoises. La critique marxiste du fétichisme de la marchandise, et du caractère aliénant et mystificateur de l'argent, s'inspire très nettement de l'opposition aristotélicienne entre l'économie et la chrémastique. On peut de la même façon, entrevoir les racines spinoziennes de l'Ethique, à travers le concept marxiste de la liberté comme composant avec la nécessité. Enfin, Marx édifie son matérialisme comme activité subjective des individus, par opposition tant de l'idéalisme allemand (Kant, Fichte, Hegel, Herder), que du matérialisme ancien (sa thèse sur La différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure n'est à ce titre pas du tout innocent), celui de Feuerbarch que le positivisme scientiste du XIXème siècle.

Afin de recentrer plus spécifiquement le sujet, on peut faire un parallèle entre ce que dit Sorel du mythe et de l’utopie et l’opposition qu’il dresse entre la violence et la force. Sorel condamne la seconde et fait l’apologie de la première, ce qui peut surprendre. On assiste en apparence à une déconcertante inversion sémantique entre violence et force. Déconcertante, cette inversion cesse de l’être dès que l’on comprend que chez Sorel le couple force-violence correspond à la distinction entre légalité et légitimité: face à la force légale, mise au service du désordre établi, l’action violente devient légitime. La force, écrit Sorel dans les Réflexions sur la violence, "a pour objet d’imposer l’organisation d’un certain ordre social dans lequel une minorité gouverne, tandis que la violence tend à la destruction de cet ordre". Edouard Berth reprendra la même idée, en disant que la force tend à l’appropriation du pouvoir, tandis que la violence vise au contraire à la décomposition du pouvoir et à l’émancipation des travailleurs.

Willy Gianinazzi précise même dans ouvrage, Naissance du mythe moderne. Georges Sorel et la crise de la pensée savante que pour Sorel, "La violence, si peu légitime pour l’opinion courante et la science,avait pour elle l’audace libératrice d’un acte de la volonté, collectivement entrepris, qui allait jusqu’à en élider l’aspect sommairement brutal, la force, au contraire, traduisait dans sa légitimité tout apparente l’emprise de l’organisation, et devait apparaître pour ce qu’elle était : une mise au pas à l’aide d’une double opération de police et de corruption". Or, c’est précisément là que s’impose la comparaison avec le couple sorélien formé par le mythe et l’utopie: "A l’utopie, qui sur un plan idéologique atrophie la liberté d’inventer, correspond, sur un plan politique, l’école d’obéissance que régit l’Etat, en contrepoint figurent aux aguets, sans cesse menacés d’altération, le mythe et la violence du prolétariat".

Il ne faut d’ailleurs pas se méprendre sur la violence dont parle Sorel, car celui-ci prend soin de souligner qu’elle ne doit jamais être synonyme de barbarie, comme l’ont été les exactions de la Terreur de 1793. pour Sorel, "On ne saurait, confondre les violences syndicalistes exercées au cours des grèves par les prolétaires qui veulent le renversement de l’Etat, avec ces actes de sauvagerie que la superstition de l’Etat a suggérés aux révolutionnaires de 93".

Sorel se borne en fait à opposer la violence révolutionnaire du prolétariat à la force injuste de l’Etat, en y voyant une "révolte pure et simple" par laquelle la classe ouvrière s’engage dans une tâche sublime. Ainsi, "Nous avons le droit", ajoute Sorel "d’espérer, qu’une révolution socialiste poursuivie par de purs syndicalistes ne serait point souillée par les abominations qui souillèrent la révolution bourgeoise". Edouard Berth dira par la suite, qu'"Il faut, apparenter la violence à l’héroïsme des révoltes sacrées s’opposant à l’exploitation cynique qu’une oligarchie, en possession de la force, fait peser sur des masses ou des minorités sacrifiées, la force est au contraire le déploiement froidement féroce d’un pouvoir cherchant à écraser une race, un peuple ou une classe vaincus et assujettis; les violences des sinn-feiners sont sympathiques, le déploiement de la force publique anglaise voulant maintenir les Irlandais sous le joug est odieux".

Berth prolonge cette réflexion dans son livre Guerre des Etats ou guerre des classes. Les "violences révolutionnaires" sont "purement et simplement des actes de guerre, elles ont exactement la valeur de démonstrations militaires et servent à marquer la séparation des classes". Sa conception de la guerre est par ailleurs fondamentalement classique, étrangère tant à la "guerre juste" de la théologie chrétienne qu’à la "guerre humanitaire" qui en est l’héritière moderne. Pour Berth, "Tout ce qui touche à la guerre, se produit sans haine et sans esprit de vengeance; en guerre, on ne tue pas les vaincus; on ne fait pas supporter à des êtres inoffensifs les conséquences des déboires que les armées peuvent avoir éprouvés sur les champs de bataille, la force s’étale alors suivant sa nature, sans jamais prétendre rien emprunter aux procédures juridiques que la société engage contre les criminels". Berth est revenu plusieurs fois sur cette idée, anticipant par là même les analyses de Carl Schmitt à propos de la criminalisation de l’ennemi à laquelle conduit la théorie discriminatoire de la "guerre juste", menée au nom de l’humanité (où le justus hostis est remplacé par la justa causa). Tel est le cas lorsque Berth distingue la violence dont parle Sorel de la violence qui se porte d’emblée aux extrêmes, et dont il discerne bien le caractère religieux. Les "horreurs des guerres et des révolutions", affirme-t-il, tiennent au "fanatisme théologique". "Les guerres de religion sont, l’histoire le prouve, les plus féroces de toutes. C’est que l’homme, quand il croit fanatiquement à une Vérité, ne peut plus voir dans son adversaire, en proie, lui, à l’Erreur, qu’une brute, un être dégradé et impur, qu’il faut exterminer ou ramener au vrai par la force: c’est la théorie de toutes les Inquisitions, qu’elles soient d’Eglise ou d’Etat, le compelle intrare, l’exorcisme; dans l’âme d’un Torquemada ou d’un Robespierre, la cruauté est fille de la charité!".

Or, assure Berth, un tel fanatisme est étranger aux révolutionnaires: "La violence sorélienne n’a rien de commun avec cette férocité toute théologique, le Dieu biblique est un dieu tout affamé de vengeance et de représailles. L’esprit guerrier, lui, est étranger à cette férocité, tout ce qui se produit en guerre entre troupes régulières se fait, comme dit Proudhon, dans les formes, et les actes de violence que la réflexion de Sorel a médités sont de vrais actes de guerre, entre troupes régulières(…)Une guerre de guérillas et de francs-tireurs présente toujours un caractère de férocité particulière, qui est, je le répète, complètement étranger à la guerre, proprement dite, à la guerre régulière(…) L’idéalisme, quel qu’il soit, est toujours cruel; car on ne saurait, en bonne logique, avoir pitié de gens dont on est convaincu que l’Esprit du mal a pris possession et qui empêchent l’humanité d’être heureuse". Ce refus de la criminalisation de l’adversaire est révélateur. La comparaison faite par Berth entre les violences prolétariennes et les actions militaires a toutefois l’inconvénient de faire disparaître l’opposition entre légalité et légitimité qui est inhérente à la conception sorélienne de la violence. On voit en effet qu’ici, l’ouvrier s’apparente nettement au soldat d’une troupe régulière, non au partisan. Opinion que l’on pourrait discuter, car le soldat agit incontestablement dans la légalité, tandis que l’ouvrier, quand il déclenche des actions qu’une injuste loi ne l’autorise pas à commettre, ne peut le faire qu’en opposant à l’ordre légal une légitimité supérieure, ce qui est très exactement ce que fait aussi le partisan.

Quoi qu'il en soit, on voit bien que George Sorel et Edouard Berth, ont déjà répondu bien à l'avance aux critiques adressées par Schmitt, Nolte, voire Furet à l'égard de la pensée marxiste, sur l'abolition de la figure politique de l'ennemi, autorisant de ce fait un fanatisme meurtrier absolu et sans limite. Et érigeant par la même occasion, la philosophie marxiste de la praxis en tant que critique de l'ingénierie sociale de type positiviste des socialistes autoritaires, mais également de l'utopie libérale et néolibérale dans son ensemble,...

PS : promis, juré la prochaine fois, ce sera (beaucoup) plus court.

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