Je vais te donner un exemple précis d'un souci qui peut naître avec une traduction de traduction.
Imagine une traduction que tu dois faire vers une langue X et qui vient de l'anglais. Tu as, toi, en français, la phrase "Et le poisson attaqua en jaillissant des eaux de la grande bleue". Aucun piège, pas de souci, pas de problème, tu prends ta phrase, tu la traduis dans ta langue X. Sauf que, en anglais, ta phrase était "The fish attacked out of the blue", laquelle doit dans les faits se traduire (plus ou moins) par "Le poisson attaqua soudainement". Et pourtant, lorsque tu as lu ta phrase en français que tu devais traduire dans ta langue X, ça n'a pas gêné. Dans le contexte, ça ne va pas vraiment gêner d'avoir l'une ou l'autre traduction. Pourtant, l'une sera exacte et retranscrira ce que l'auteur désirait dire, tandis que l'autre sera erronée.
À partir de là, je ne prône pas la fidélité absolue à la langue, mais plus à l'intention de l'auteur. Il est certaines choses qui nécessitent de l'exactitude, ne serait-ce que parce que, dans le fil de la traduction, on ne va pas forcément faire gaffe à un truc qu'on avait traduit il y a vingt pages (voire, pire, à un truc qui va arriver dans une suite ou un équivalent) - par exemple, imaginons qu'à six heures du matin il va se passer quelque chose de particulier, mais trente ou quarante pages après l'erreur ayant fait marquer sept heures. L'incohérence va arriver, et va être extrêmement dure à repérer pour quelqu'un qui a le nez dans le texte - et même pour un correcteur, dans les faits. Pourtant, le joueur, qui reçoit le produit fini et le savoure à son rythme, à son envie, pourra le voir.
La précision est, en traduction, une clef indispensable, et c'est pour cela que de petites erreurs sans répercussions véritables sont, à mon sens, à éviter autant que faire se peut. Et c'est dans cette logique que la traduction de traduction, qui se confronte à potentiellement plus de ces erreurs.
Si l'on considère, de plus, que traduire sept heures au lieu de six heures n'est pas grave, cela ouvre la porte à des approximations de plus en plus grandes. Dans tous les cas, une traduction va perdre une partie de l'essence du texte premier : pouvoir être confronté au plus proche de celui-ci est, très certainement, un moyen de savourer l'intention de l'auteur (et c'est aussi pour rendre cette intention que, combinée à la précision, viendra le côté où le traducteur talentueux s'éloignera du style de l'auteur pour rendre ce style d'une façon qui, dans la langue d'arrivée, sera perçue d'une façon équivalente à la façon dont ce style était perçu dans sa langue d'origine... mais on arrive là à un niveau de traduction rêvé, je pense ; disons simplement que l'absence de fidélité absolue pour gagner en respect de l'intention de l'auteur est une chose délicieuse, mais très difficile à maîtriser).
Et, sur la question de l'anglais et du français lorsqu'on ne maîtrise pas l'anglais de façon relative courante, je te suis, sans grande hésitation. Néanmoins, il ne faut pas oublier que, pour beaucoup de joueurs et joueuses, c'est aussi un moyen de progresser dans une autre langue. J'avoue que le côté "saisir les nuances" face au côté "progresser vers ces mêmes nuances" est un choix très personnel à faire, vis-à-vis d'un jeu.