Par rapport à son prédécesseur, il est clairement mieux, surtout au niveau gameplay même si celui-ci n'est pas exempt de défauts. L'histoire trouve ses réponses à ses questions suite au voyage d'Alice dans les tréfonds de son subconscient. Mais je n'ai pas été vraiment convaincu au final par le dénouement, ni même par le voyage tout compte fait quant au déroulement de sa trame. L'intrigue se révèle certes petit à petit, montrant l'évidence des choses, mais le rythme et les idées n'aident pas à ce qu'elle décolle et s'envole, prenant des airs complexes en tournant autour du pot alors qu'au final il n'est prétexte qu'à un voyage intérieur, ramenant périodiquement à la réalité dans la ville de Londres, entre les chapitres, et dans la peau d'une Alice se cherchant elle-même, au plus profond de sa psyché et de ses synapses pour faire la lumière sur l'incendie qui brûla sa maison et tua sa famille. Alice trouve refuge au sein du Pays des Merveilles, et c'est là qu'elle trouvera ses réponses, aussi saugrenu cela puisse-t-il sembler. C'est un combat contre les démons de la jeune femme, bien mis en scène toutefois avec des idées de direction artistique bien recherchées pour dégager un sentiment perpétuel de torture spirituelle. Les niveaux du jeu, se découpant en 6 chapitres, aident à avoir cette impression de voyager dans un univers à la fois féerique et malsain, enchanteur et glauque, avec une touche d'humour (souvent noir) inhérent à l'ambiance avec des jeux de mots et de jeux de rimes accompagnant en tant que saveur, même si parfois c'est un peu lourd il faut bien l'avouer. Question DA et level-design, je me suis quand même bien fait plaisir et j'ai pu voir des choses défiant l'imagination, me régalant les rétines car j'avais rarement vu de telles idées dans un jeu vidéo, tout du moins un jeu de ce genre. En effet, il y a des phases atypiques de jeu proposant de jouer aux échecs où il faut amener notre pion et son alter-ego à la sortie en même temps tout en évitant les pions ennemis et les obstacles dans un nombre d'essais limités. Des phases de jeu de plateforme en 2D façon maquette de papier pour théâtre donnant l'impression de donner vie à un tableau, le tout à l'encre de Chine. Ou encore des passages alternant 2D/3D nécessitant de la réflexion en dirigeant une tête de poupée obéissant à une certaine loi de la physique sur les décors la guidant au travers d'éléments mobiles et interactifs, avec quelques passages à la Monkey Ball en prime. Les idées ne manquent pas, et on a vraiment l'impression de nager en plein rêve, tout le temps. C'est là toute la magie du Pays des Merveilles, que ce soit sous son aspect lumineux ou sombre, et plus particulièrement sombre car la folie est de mise comme l'indique si bien le titre du jeu. En cela, il porte d'ailleurs très bien son nom.
J'ai été particulièrement charmé par un niveau du jeu où le but est d'avancer en traversant des ponts de cartes (le chemin se dessine à mesure qu'on avance mais il faut faire gaffe de pas tomber dans le vide) dans le ciel en traversant des châteaux de cartes. En outre, j'ai pas mal apprécié un niveau avec des maisons de poupées, ces maisons s'ouvrant de la même manière que les maisons de poupées pour enfants, et le principe est ma foi très bien trouvé pour la navigation.
Le jeu joue dans la même cour que son grand frère (American McGee's Alice), à savoir un jeu d'action / plateforme en 3D avec vue classique au dos du personnage. Alice possède une gamme d'armes plus importante que par le passé : un glaive vorpalin (son couteau de cuisine en somme) assez rapide à manier pour le corps-à-corps, un moulin à poivre pour tirer à longue portée, un cheval de bois lent mais idéal pour assommer les ennemis en mêlée, une théière envoyant des jets d'acide explosif, une bombe chronométrée pouvant activer des dalles et causant des dommages aux ennemis à proximité. Certaines de ses armes peuvent aussi être utilisées pour détruire des obstacles et activer des interrupteurs. Il y a bien quelques "petites énigmes" qui scandent le parcours d'Alice entre les nombreux combats dynamiques qu'elle doit livrer pour progresser, mais je les qualifierais plutôt d'épreuves chronométrées de logique sollicitant jugeote, réflexion et... un minimum de réflexion ! Tant mieux, ça apporte un bon rythme et ça équilibre les moments d'exploration et les rixes. Entre tout ça, il y a les phases de plateforme très présentes et c'est là que la bât blesse. Si Alice se contrôle correctement, la caméra ne suit pas toujours l'angle parfait, et il n'est pas rare qu'on ait du mal à calculer la distance entre les sauts sur les plateformes et l'endroit où on va se poser. Aussi, le jeu a la fâcheuse manie de montrer un angle de vue d'où on doit aller suite à l'activation d'une dalle ou d'un levier, et le temps tourne pendant cette angle de vue impossible à zapper bien que durant brièvement. Mais comme souvent les épreuves chronométrées ont un timing serré, on est quelque peu contraint de contrôler Alice au cours de ces plans de vue gênants et masquant la visibilité.
Sinon, il y a de quoi faire. Déjà pour monter en puissance, on peut améliorer notre arsenal via des dents qu'on trouve un peu partout dans les tableaux en faisant gagner des niveaux pour augmenter leurs dégâts et leur efficacité. Possibilité également d'augmenter la jauge de vie représentée par des roses en progressant mais aussi en combinant quatre fragments de rose pour en gagner une nouvelle. Et bien sûr, différents collectibles, notamment sous forme de souvenirs d'Alice pour comprendre son histoire et sa détresse, sont à trouver, prolongeant ainsi l'exploration et la durée de vie du soft qui est déjà excellente à la base pour le genre. J'ai bien dû dépasser la vingtaine d'heures pour ma première partie, même s'il n'y a pas de chronomètre indiquant le temps exact. Là où le précédent jeu des aventures d'Alice se voulait linéaire avec quelques rares bifurcations ou impasses amenant à des objets rechargeant santé et magie, Madness Returns fait la part belle à l'exploration et à la chasse aux trésors, et il faut dire que la manière comment sont conçus les environnements encouragent à cela. Alice peut planer avec sa robe, d'ailleurs elle change de tenue à chaque monde. C'est le carnaval ! Elle a aussi une ombrelle qui peut bloquer certaines attaques ennemies et renvoyer des projectiles. Les monstres ne sont pas spécialement beaux, mais n'en restent pas moins cohérents avec l'univers du jeu et une partie de ces créatures ne peuvent être occises qu'en utilisant certaines armes ou techniques en visant des points sensibles. Le jeu est loin d'être bourrin même si l'action est très présente.
Le titre a pas mal vieilli (2011), c'est ni moche ni joli, même pour l'époque, tout juste correct. Il faut dire que c'est voulu l'aspect un peu Disney / Toy Story sur certains humains quand on déambule dans les rues londoniennes. Il y a sinon un petit côté Tim Burton dans les niveaux fantaisistes du Pays des Merveilles. Rien de transcendant, mais ça colle bien. À noter souvent des ralentissements après une sauvegarde automatique et un peu plus rarement dans les combats incluant beaucoup d'ennemis. Dommage.
Musicalement, enfin, c'est loin d'être la panacée. J'ai trouvé la bande sonore assez quelconque. Certaines musiques ne collent pas du tout, et quelques rares bercent l'ambiance de leurs niveaux respectifs. Mais dans tous les cas, ça passe assez inaperçu, et les effets sonores en revanche sont mieux travaillés... bizarrement. Le doublage français, je l'ai trouvé moyen. J'ai préféré celui du jeu précédent, notamment pour la voix d'Alice.
Meilleur que son prédécesseur à bien des égards, techniquement moyen, histoire qui aurait pu être plus aboutie malgré un bon fond, souffrant d'une caméra capricieuse, avec des musiques ne faisant ni chaud ni froid, ce Madness Returns reste quand même un bon jeu, tout juste sympathique, et s'adresse à ceux qui aiment l'univers d'Alice ou ceux qui sont intrigués par ce genre d'univers, car il a tous les ingrédients qu'il faut pour en faire un voyage fantastique. Très fidèle à l'univers de Lewis Carroll. La DA et les idées de gameplay et de design étant un plus pour se plonger dedans.